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Cet article se veut instructif et est issue d'un mémoire de Christophe CORBEL – Mémoire de l’École Nationale de la Santé Publique – 2002.
L'existence d'une cabine de peinture dans le garage Peugeot qui va désormais se trouver à proximité de cette zone est la raison de sa publication.
Vous trouverez ci dessous la règlementation européenne puis celle de la France
CONTEXTE LEGISLATIF ET REGLEMENTAIRE RELATIF AUX REJETS ATMOSPHERIQUES DES CABINES DE PEINTURE
Le rôle de L’Union Européenne (UE) est primordial en matière d’environnement. La pression législative de l’UE est à l’origine de la modification des formulations des peintures. Le but recherché étant initialement une diminution des émissions de composés organiques volatils (COV). En effet les COV sont des précurseurs de l’ozone. Ils réagissent sous l’influence des ultra-violets et aboutissent à la formation d’ozone troposphérique, polluant secondaire responsable d’effets délétères sur la santé humaine et sur la végétation.
3.1 Législation européenne
La directive 1999/13/CE [44] fixe les objectifs de réduction des émissions de COV dans l'union européenne. Parmi les activités visées par cette directive se trouve celle des garages automobiles (revêtement et retouche de véhicules). Cette directive concerne les carrosseries qui utilisent plus de 500 kg.an-1 de solvant pour leurs activités de peintures. Les garages peuvent également être concernés par l'application de cette directive s'ils utilisent plus de 1 T/an de solvants à des fins de nettoyage de surface.
La directive préconise une réduction des émissions à la source, en appliquant le principe de
la meilleure technique disponible, plutôt qu’un traitement des rejets. Deux seuils sont également imposés à l’annexe II A de la directive [44] :
ð la valeur limite d’émission diffuse est fixée à 25 % ;
ð lavaleurlimited’émissiondegazrésiduairesestfixéeà50mgC.Nm-3.
La valeur moyenne de 54,5 % en solvant imposera aux carrossiers d’utiliser un système de peinture hydrodiluable.
3.2 Législation et réglementation françaises
La législation est présentée en fonction des différentes sources de droit.
3.2.1 Le Code de l'environnement : veiller à la santé publique !
Le code de l'environnement codifie la loi sur l'air de 1996 qui reconnaît le droit à chacun de
respirer un air qui ne nuise pas à sa santé. Cette déclaration reste cependant délicate à mettre en œuvre dans la pratique.
Livre II ; Titre II : Air et atmosphère ; Art. L. 220-1 : « L'État et ses établissements publics, les collectivités territoriales et leurs établissements publics ainsi que les personnes privées concourent, chacun dans le domaine de sa compétence et dans les limites de sa responsabilité, à une politique dont l'objectif est la mise en œuvre du droit reconnu à chacun à respirer un air qui ne nuise pas à sa santé. Cette action d'intérêt général consiste à prévenir, à surveiller, à réduire ou à supprimer les pollutions atmosphériques, à préserver la qualité de l'air.... »
La définition de l’OMS selon laquelle « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité » peut amener à reconnaître les nuisances olfactives comme étant des troubles pour la santé. Le champ d’application de l’article L 220-1 devient alors extrêmement large.
3.2.2 Revue des textes législatifs et réglementaires
3.2.2.1 Législation relative aux Installations Classées pour la Protection de l'Environnement (ICPE)
La loi du 19 juillet 1976 sur les ICPE (désormais codifiée dans le livre V, titre I du code de l’environnement) et la nomenclature associée (mise à jour par décret du conseil d’état) prennent en compte l’activité de peintre carrossier. Cette nomenclature a été modifiée deux fois en ce qui concerne l’activité de peintre carrossier depuis 1996.
3.2.2.1.1 Situation avant 1996
Avant le décret n° 96-197 [47], dans l’ancienne nomenclature, les installations étaient toujours soumises au moins à déclaration (point 405 de la nomenclature : Vernis, peintures, encres). Les installations étaient alors regroupées en deux sous-groupes :
ð
405.A : Vernis à base de liquides inflammables de deuxième catégorie, odorants ou
toxiques (405.A.1 = application par pulvérisation, 405.A.2 = quantité présente dans l’installation > 100 L) ;
405.B : Vernis à base d’alcools ou liquide inflammable de première catégorie (405.B.1 : application par pulvérisation, quantité < 25 L.j-1 ; 405.B.2 : application par
trempé, produit présent en quantité comprise entre 20 et 100 L ; 405.B.3 : autre
ð
procédé, produit présent en quantité comprise entre 20 et 200 L).
Dans tous les cas, les prescriptions applicables précisaient qu’en cas de gêne pour le voisinage, un dispositif de traitement des rejets gazeux pouvait être exigé.
Ainsi l’arrêté type 404, dans la partie IV. - Prescriptions d'ensemble- précise à l’article 29 : « Il est interdit d'émettre dans l'atmosphère des fumées épaisses, des buées, des suies, des poussières ou des gaz odorants, toxiques ou corrosifs, susceptibles d'incommoder le voisinage, de nuire à la santé ou à la sécurité publique... »
L’arrêté type 405 est également clair sur les rejets provenant des carrosseries : les articles 4 et 5 spécifient : « les vapeurs [...] seront refoulées au-dehors par une cheminée de hauteur
telle qu'il n'en résulte ni incommodité ni insalubrité pour le voisinage ; si l'emplacement de l'atelier et ses conditions d'exploitation constituent cependant une gêne pour le voisinage, un dispositif efficace de captation ou de neutralisation des vapeurs ou des poussières [...] pourra être exigé ».
3.2.2.1.2 ... de 1996 à 2002 ...
Après le décret n° 96-197 les cabines de peintures ont été visées par la rubrique 2940 : « Vernis, apprêt, colle, enduit, etc ». Lorsque la quantitéa de produit susceptible d'être utilisée est supérieure à 100kg.j-1, l'installation est soumise à autorisation (2940.2.A). Si la quantité de produit utilisée est comprise entre 10 et 100 kg.j- 1, l'installation est soumise à déclaration (2940.2.B).
Les seuils d'autorisation et de déclaration apparaissent toutefois relativement élevés par rapport aux quantités de produits généralement utilisées dans les cabines de peinture artisanales. Aussi, la plupart des installations artisanales de peinture n’ont plus été concernées par la réglementation ICPE (80% environ auraient été déclassées [92]).
3.2.2.1.3 ... et depuis le 30 avril 2002
La transposition en droit français de la directive européenne [44] imposait une modification de la nomenclature pour prendre en compte le seuil des 500kg.an-1 de solvant. La nomenclature a donc été modifiée par le décret du 30 avril 2002a (décret n° 2002-680).
La rubrique 2930.2, concerne désormais spécifiquement les installations de carrosserie automobile: cette rubrique reprend les termes de la rubrique 2940.2, en ajoutant la
contrainte de 500 kg.an- 1 de solvant utilisé pour seuil ICPE/D.
3.2.2.1.4 Autres textes applicables aux carrosseries classées
La circulaire 95-80 du ministère de l'environnement [46] précise que les installations de
peinture automobile (soumises à la réglementation ICPE) devront poursuivre les efforts engagés en matière de réduction des rejets de COV. Cette directive appelle à mettre en œuvre de nouvelles techniques, notamment des peintures hydrodiluables et des procédés de traitement de l'air.
L’arrêté du 2 février 1998 [47] fixe les seuils de rejets des ICPE/A. On peut noter que cet arrêté est utilisé, en cas de conflit, par la DRIRE 72 [92] pour proposer des seuils d’émission
à une cabine de peinture ICPE/D (gaz à l’émission < 150 mg C.Nm-3).
Concernant les odeurs [32], l’article 29 de l’annexe à la circulaire du 27 décembre 1998, pris en application de l’arrêté du 2 février 1998, précise les hauteurs d’émission conseillées en
fonction du débit d’odeur.
Tableau 8 : Débit d’odeur maximum conseillé en fonction de la hauteur d’émission. (Tableau ci dessous)
hauteur d’émission (m) |
débit d’odeur (m3.h-1) |
0 |
1.106 |
5 |
3,6.106 |
10 |
21.106 |
20 |
180.106 |
30 |
720.106 |
50 |
3 600.106 |
80 |
18 000.106 |
100 |
36 000.106 |
3.2.2.2 Règlement sanitaire départemental (RSD)
Les conditions de rejets sont brièvement précisées dans le règlement sanitaire départemental pour les installations dont la consommation de solvant est inférieure à
500 kg.an- 1 (installations non classées). Le RSD type [43] précise de manière sommaire les conditions de rejets auxquelles doivent satisfaire les locaux à pollution spécifique (Titre III Dispositions applicables aux bâtiments autres que ceux à usage d'habitation et assimilés ; Section II. - Ventilation des locaux ; art. 63) :
« Les prises d'air neuf et les ouvrants doivent être placés en principe à au moins huit mètres de toute source éventuelle de pollution [...]. Des dispositions plus strictes peuvent être
décidées par l'autorité compétente lorsqu'il y a voisinage d'une grande quantité d'air pollué [...] L'air extrait des locaux doit être rejeté à au moins huit mètres de toute fenêtre ou de toute prise d'air neuf sauf aménagements tels qu'une reprise d'air pollué ne soit pas possible. L'air extrait des locaux à pollution spécifique doit, en outre, être rejeté sans recyclage. »
3.2.2.3 Code du travail
Le code du travail [43] précise de manière stricte les conditions d'emploi des cabines de peinture. Les dispositions présentes dans le code du travail ne concernent pas directement les riverains des cabines de peinture. Toutefois, le contrôle des conditions de fonctionnement de l'atelier peut être utile en cas de conflit.
Les articles R 232-5-1 à R 232-5-14 et R 235-2-4 à R 235-2-8 concernent les conditions d'aération et assainissement des lieux de travail.
Il apparaît notamment que les applications de peintures ne sont envisageables que dans des cabines de peinture (R 232-5-7). Les règles de conception et construction spécifiques aux cabines de peinture sont précisées aux articles R 233-140 à R 233-149. Les cabines de peinture destinées à peindre des voitures (subjectile fixe) doivent obligatoirement être à flux d'air vertical.
Le décret 90-53 [50] ajoute les cabines de peinture au champ d'application des articles R 233-85 à R 233-149. Les conditions de ventilation sont précisées dans l'arrêté du 3 mai 1990 [51] (au moins 0,4 m.s-1) et rend d'application obligatoire la norme NF T 35.009 [2].
Enfin, il apparaît que la Caisse Régionale d’Assurance Maladie (CRAM) de Nantes préfère
s’assurer du respect des conditions de ventilation plutôt que de surveiller les expositions
professionnelles (les conditions de ventilation sont censées permettre le respect des limites d’expositions professionnelles).
3.2.2.4 Code de l’urbanisme
Si la commune est dotée d’un Plan d’Occupation des Sols (POS) ou d’un Plan Local d’Urbanisme (PLU), le maire peut mettre en demeure l’exploitant de mettre ses installations en conformité avec la zone d’urbanisme dans laquelle il est implanté (cf. § 3.2.3.3 ; annexe II).
On peut noter que certaines ICPE, telles que les pressings, peuvent être autorisées en
zones urbaines (sous conditions) car reconnues comme installation de proximité. Il est donc nécessaire de consulter les POS ou PLU locaux.
3.2.3 Jurisprudence [43]
Quelques affaires relatives à des nuisances issues d’installations de peinture ont récemment été jugées.
3.2.3.1 Affaire Renaux : Rôle du préfet, des communes et statut d'ICPE
Dans cette affaire, des riverains ont attaqué un atelier de peinture à cause des nuisances olfactives provoquées par celui-ci.
L'installation en cause n'entre pas sous la rubrique 2940 des ICPE car les quantités de
produits utilisés sont trop faibles (rapport inspecteur ICPE). Le préfet du Val d'Oise décide par arrêté du 15 novembre 1999 d'imposer des prescriptions techniques au propriétaire (notamment traitement de l'air par charbon actif), en considérant l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 (i.e. considérer l'installation comme une ICPE, en regard de son danger grave et immédiat).
Suite aux expertises [39, 11] réalisées dans le cadre de cette affaire, il a été montré que
« les produits rejetés [...] sont en quantité tellement minime qu'ils ne sont pas susceptibles de porter atteinte à la santé des riverains ». Le tribunal de Cergy-Pontoise a donc annulé l'arrêté du préfet, en considérant que la réglementation ICPE ne pouvait s'appliquer à
l'installation de peinture artisanale. Cette expertise n’a pas mis en évidence un polluant particulier, mais des soupçons sont apparus vis-à-vis des durcisseurs.
Dans la même affaire, en 1997, le maire de la commune où se trouve le garage avait ordonné la fermeture de l'installation. La cour administrative d'appel de Paris a décidé que le maire ne pouvait ordonner une telle fermeture, car l'établissement ne présente pas de danger grave et imminent. Cette affaire montre donc que tant qu’il n’a pas été fait preuve d’un danger grave et imminent :
ð ni le maire ni le préfet ne sont compétents pour fermer ou imposer des prescriptions à une installation de peinture artisanale ;
ð les cabines de peinture non classées ne peuvent être considérées comme ICPE au regard de l'article 1 de la loi du 19/07/1976.
3.2.3.2 Affaire Elia contre garage du gymnase
Dans cette affaire (audience du 22 mai 1997), les époux Elia se plaignent des « troubles du voisinage » causés par la cabine de peinture automobile d'un garage proche. Les époux Elia
demandent des dommages et intérêts car :
ð la commune est dotée d'un POS et le garage est construit en zone UA ;
ð la cabine de peinture provoque des nuisances sonores et olfactives (odeurs
d'hydrocarbures).
L'arrêt rendu par la cour de cassation lors de cette affaire condamne le garage à payer
9 000 FRF de dommages et intérêts aux époux Elia, mais ne demande pas la suppression d’activité de la cabine. L'affaire a été renvoyée à la cour d'appel de Paris.
3.2.3.3 Affaire Malin : construction en zone UD d’un POS
M. Malin désire construire une cabine de peinture en zone UD, dans une ZAC. Une association de riverain a contesté le PC qui avait été délivré (4/02/1992). Ce PC a été annulé
par le TA de Chalon sur Marne (15/03/1992) car l’article 1.3 du règlement d’urbanisme applicable à la ZAC impose des conditions sur les installations pouvant engendrer des nuisances pour les habitations de la ZAC (en 1992, la cabine de peinture était encore soumise à déclaration).
Le 30/06/1994, la CAA de Nancy a confirmé la décision d’annulation du PC qui avait été accordé, notamment en considérant que la cabine de peinture « entraînerait forcément des nuisances olfactives ». Toutefois, on peut se demander si cette décision serait appliquée de la même manière, maintenant que la cabine ne constitue plus une ICPE/D.
3.2.3.4 Jurisprudence générale relative aux odeurs [32]
La jurisprudence relative aux odeurs fait apparaître des décisions relatives à :
un préjudice olfactif, dans ce cas le juge peut accorder des réparations à des
plaignants gênés par des odeurs, sans qu’il n’y ait de notion de toxicité attachée au préjudice ;
un tribunal administratif peut imposer des prescriptions complémentaires pour réduire les odeurs émises par une ICPE ;
Bilan sur la réglementation en vigueur
Lorsque l’atelier de carrosserie utilise plus de 500 kg de solvant par an, il est classé ICPE/D. S’il consomme plus de 100 kg.j- 1 (ce qui correspond à la consommation d’une installation industrielle) de produit il est classé ICPE/A. La réglementation qui s’applique dans ces deux cas est bien définie et permet de gérer les éventuels conflits.
Dans le cas où la cabine de peinture n’est pas classée, la réglementation existante est très précise par rapport à la protection des travailleurs, mais elle reste limitée en ce qui concerne les rejets ou la protection des riverains : le RSD pourra être utilisé pour justifier de la nécessité de travaux sur les conduits de rejet.
Il peut donc se révéler utile de disposer d’éléments facilitant le déroulement d’une évaluation des risques, pour pouvoir se référer ensuite à l’article L 220-1 du code de l’environnement.
Cet article se veut instructif et est issue d'un mémoire de Christophe CORBEL – Mémoire de l’École Nationale de la Santé Publique – 2002.
L'existence d'une cabine de peinture dans le garage Peugeot qui va désormais se trouver à proximité de cette zone est la raison de sa publication.
Vous trouverez ci dessous la règlementation européenne puis celle de la France
CONTEXTE LEGISLATIF ET REGLEMENTAIRE RELATIF AUX REJETS ATMOSPHERIQUES DES CABINES DE PEINTURE
Le rôle de L’Union Européenne (UE) est primordial en matière d’environnement. La pression législative de l’UE est à l’origine de la modification des formulations des peintures. Le but recherché étant initialement une diminution des émissions de composés organiques volatils (COV). En effet les COV sont des précurseurs de l’ozone. Ils réagissent sous l’influence des ultra-violets et aboutissent à la formation d’ozone troposphérique, polluant secondaire responsable d’effets délétères sur la santé humaine et sur la végétation.
3.1 Législation européenne
La directive 1999/13/CE [44] fixe les objectifs de réduction des émissions de COV dans l'union européenne. Parmi les activités visées par cette directive se trouve celle des garages automobiles (revêtement et retouche de véhicules). Cette directive concerne les carrosseries qui utilisent plus de 500 kg.an-1 de solvant pour leurs activités de peintures. Les garages peuvent également être concernés par l'application de cette directive s'ils utilisent plus de 1 T/an de solvants à des fins de nettoyage de surface.
La directive préconise une réduction des émissions à la source, en appliquant le principe de
la meilleure technique disponible, plutôt qu’un traitement des rejets. Deux seuils sont également imposés à l’annexe II A de la directive [44] :
ð la valeur limite d’émission diffuse est fixée à 25 % ;
ð lavaleurlimited’émissiondegazrésiduairesestfixéeà50mgC.Nm-3.
La valeur moyenne de 54,5 % en solvant imposera aux carrossiers d’utiliser un système de peinture hydrodiluable.
3.2 Législation et réglementation françaises
La législation est présentée en fonction des différentes sources de droit.
3.2.1 Le Code de l'environnement : veiller à la santé publique !
Le code de l'environnement codifie la loi sur l'air de 1996 qui reconnaît le droit à chacun de
respirer un air qui ne nuise pas à sa santé. Cette déclaration reste cependant délicate à mettre en œuvre dans la pratique.
Livre II ; Titre II : Air et atmosphère ; Art. L. 220-1 : « L'État et ses établissements publics, les collectivités territoriales et leurs établissements publics ainsi que les personnes privées concourent, chacun dans le domaine de sa compétence et dans les limites de sa responsabilité, à une politique dont l'objectif est la mise en œuvre du droit reconnu à chacun à respirer un air qui ne nuise pas à sa santé. Cette action d'intérêt général consiste à prévenir, à surveiller, à réduire ou à supprimer les pollutions atmosphériques, à préserver la qualité de l'air.... »
La définition de l’OMS selon laquelle « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité » peut amener à reconnaître les nuisances olfactives comme étant des troubles pour la santé. Le champ d’application de l’article L 220-1 devient alors extrêmement large.
3.2.2 Revue des textes législatifs et réglementaires
3.2.2.1 Législation relative aux Installations Classées pour la Protection de l'Environnement (ICPE)
La loi du 19 juillet 1976 sur les ICPE (désormais codifiée dans le livre V, titre I du code de l’environnement) et la nomenclature associée (mise à jour par décret du conseil d’état) prennent en compte l’activité de peintre carrossier. Cette nomenclature a été modifiée deux fois en ce qui concerne l’activité de peintre carrossier depuis 1996.
3.2.2.1.1 Situation avant 1996
Avant le décret n° 96-197 [47], dans l’ancienne nomenclature, les installations étaient toujours soumises au moins à déclaration (point 405 de la nomenclature : Vernis, peintures, encres). Les installations étaient alors regroupées en deux sous-groupes :
ð
405.A : Vernis à base de liquides inflammables de deuxième catégorie, odorants ou
toxiques (405.A.1 = application par pulvérisation, 405.A.2 = quantité présente dans l’installation > 100 L) ;
405.B : Vernis à base d’alcools ou liquide inflammable de première catégorie (405.B.1 : application par pulvérisation, quantité < 25 L.j-1 ; 405.B.2 : application par
trempé, produit présent en quantité comprise entre 20 et 100 L ; 405.B.3 : autre
ð
procédé, produit présent en quantité comprise entre 20 et 200 L).
Dans tous les cas, les prescriptions applicables précisaient qu’en cas de gêne pour le voisinage, un dispositif de traitement des rejets gazeux pouvait être exigé.
Ainsi l’arrêté type 404, dans la partie IV. - Prescriptions d'ensemble- précise à l’article 29 : « Il est interdit d'émettre dans l'atmosphère des fumées épaisses, des buées, des suies, des poussières ou des gaz odorants, toxiques ou corrosifs, susceptibles d'incommoder le voisinage, de nuire à la santé ou à la sécurité publique... »
L’arrêté type 405 est également clair sur les rejets provenant des carrosseries : les articles 4 et 5 spécifient : « les vapeurs [...] seront refoulées au-dehors par une cheminée de hauteur
telle qu'il n'en résulte ni incommodité ni insalubrité pour le voisinage ; si l'emplacement de l'atelier et ses conditions d'exploitation constituent cependant une gêne pour le voisinage, un dispositif efficace de captation ou de neutralisation des vapeurs ou des poussières [...] pourra être exigé ».
3.2.2.1.2 ... de 1996 à 2002 ...
Après le décret n° 96-197 les cabines de peintures ont été visées par la rubrique 2940 : « Vernis, apprêt, colle, enduit, etc ». Lorsque la quantitéa de produit susceptible d'être utilisée est supérieure à 100kg.j-1, l'installation est soumise à autorisation (2940.2.A). Si la quantité de produit utilisée est comprise entre 10 et 100 kg.j- 1, l'installation est soumise à déclaration (2940.2.B).
Les seuils d'autorisation et de déclaration apparaissent toutefois relativement élevés par rapport aux quantités de produits généralement utilisées dans les cabines de peinture artisanales. Aussi, la plupart des installations artisanales de peinture n’ont plus été concernées par la réglementation ICPE (80% environ auraient été déclassées [92]).
3.2.2.1.3 ... et depuis le 30 avril 2002
La transposition en droit français de la directive européenne [44] imposait une modification de la nomenclature pour prendre en compte le seuil des 500kg.an-1 de solvant. La nomenclature a donc été modifiée par le décret du 30 avril 2002a (décret n° 2002-680).
La rubrique 2930.2, concerne désormais spécifiquement les installations de carrosserie automobile: cette rubrique reprend les termes de la rubrique 2940.2, en ajoutant la
contrainte de 500 kg.an- 1 de solvant utilisé pour seuil ICPE/D.
3.2.2.1.4 Autres textes applicables aux carrosseries classées
La circulaire 95-80 du ministère de l'environnement [46] précise que les installations de
peinture automobile (soumises à la réglementation ICPE) devront poursuivre les efforts engagés en matière de réduction des rejets de COV. Cette directive appelle à mettre en œuvre de nouvelles techniques, notamment des peintures hydrodiluables et des procédés de traitement de l'air.
L’arrêté du 2 février 1998 [47] fixe les seuils de rejets des ICPE/A. On peut noter que cet arrêté est utilisé, en cas de conflit, par la DRIRE 72 [92] pour proposer des seuils d’émission
à une cabine de peinture ICPE/D (gaz à l’émission < 150 mg C.Nm-3).
Concernant les odeurs [32], l’article 29 de l’annexe à la circulaire du 27 décembre 1998, pris en application de l’arrêté du 2 février 1998, précise les hauteurs d’émission conseillées en
fonction du débit d’odeur.
Tableau 8 : Débit d’odeur maximum conseillé en fonction de la hauteur d’émission. (Tableau ci dessous)
hauteur d’émission (m) |
débit d’odeur (m3.h-1) |
0 |
1.106 |
5 |
3,6.106 |
10 |
21.106 |
20 |
180.106 |
30 |
720.106 |
50 |
3 600.106 |
80 |
18 000.106 |
100 |
36 000.106 |
3.2.2.2 Règlement sanitaire départemental (RSD)
Les conditions de rejets sont brièvement précisées dans le règlement sanitaire départemental pour les installations dont la consommation de solvant est inférieure à
500 kg.an- 1 (installations non classées). Le RSD type [43] précise de manière sommaire les conditions de rejets auxquelles doivent satisfaire les locaux à pollution spécifique (Titre III Dispositions applicables aux bâtiments autres que ceux à usage d'habitation et assimilés ; Section II. - Ventilation des locaux ; art. 63) :
« Les prises d'air neuf et les ouvrants doivent être placés en principe à au moins huit mètres de toute source éventuelle de pollution [...]. Des dispositions plus strictes peuvent être
décidées par l'autorité compétente lorsqu'il y a voisinage d'une grande quantité d'air pollué [...] L'air extrait des locaux doit être rejeté à au moins huit mètres de toute fenêtre ou de toute prise d'air neuf sauf aménagements tels qu'une reprise d'air pollué ne soit pas possible. L'air extrait des locaux à pollution spécifique doit, en outre, être rejeté sans recyclage. »
3.2.2.3 Code du travail
Le code du travail [43] précise de manière stricte les conditions d'emploi des cabines de peinture. Les dispositions présentes dans le code du travail ne concernent pas directement les riverains des cabines de peinture. Toutefois, le contrôle des conditions de fonctionnement de l'atelier peut être utile en cas de conflit.
Les articles R 232-5-1 à R 232-5-14 et R 235-2-4 à R 235-2-8 concernent les conditions d'aération et assainissement des lieux de travail.
Il apparaît notamment que les applications de peintures ne sont envisageables que dans des cabines de peinture (R 232-5-7). Les règles de conception et construction spécifiques aux cabines de peinture sont précisées aux articles R 233-140 à R 233-149. Les cabines de peinture destinées à peindre des voitures (subjectile fixe) doivent obligatoirement être à flux d'air vertical.
Le décret 90-53 [50] ajoute les cabines de peinture au champ d'application des articles R 233-85 à R 233-149. Les conditions de ventilation sont précisées dans l'arrêté du 3 mai 1990 [51] (au moins 0,4 m.s-1) et rend d'application obligatoire la norme NF T 35.009 [2].
Enfin, il apparaît que la Caisse Régionale d’Assurance Maladie (CRAM) de Nantes préfère
s’assurer du respect des conditions de ventilation plutôt que de surveiller les expositions
professionnelles (les conditions de ventilation sont censées permettre le respect des limites d’expositions professionnelles).
3.2.2.4 Code de l’urbanisme
Si la commune est dotée d’un Plan d’Occupation des Sols (POS) ou d’un Plan Local d’Urbanisme (PLU), le maire peut mettre en demeure l’exploitant de mettre ses installations en conformité avec la zone d’urbanisme dans laquelle il est implanté (cf. § 3.2.3.3 ; annexe II).
On peut noter que certaines ICPE, telles que les pressings, peuvent être autorisées en
zones urbaines (sous conditions) car reconnues comme installation de proximité. Il est donc nécessaire de consulter les POS ou PLU locaux.
3.2.3 Jurisprudence [43]
Quelques affaires relatives à des nuisances issues d’installations de peinture ont récemment été jugées.
3.2.3.1 Affaire Renaux : Rôle du préfet, des communes et statut d'ICPE
Dans cette affaire, des riverains ont attaqué un atelier de peinture à cause des nuisances olfactives provoquées par celui-ci.
L'installation en cause n'entre pas sous la rubrique 2940 des ICPE car les quantités de
produits utilisés sont trop faibles (rapport inspecteur ICPE). Le préfet du Val d'Oise décide par arrêté du 15 novembre 1999 d'imposer des prescriptions techniques au propriétaire (notamment traitement de l'air par charbon actif), en considérant l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 (i.e. considérer l'installation comme une ICPE, en regard de son danger grave et immédiat).
Suite aux expertises [39, 11] réalisées dans le cadre de cette affaire, il a été montré que
« les produits rejetés [...] sont en quantité tellement minime qu'ils ne sont pas susceptibles de porter atteinte à la santé des riverains ». Le tribunal de Cergy-Pontoise a donc annulé l'arrêté du préfet, en considérant que la réglementation ICPE ne pouvait s'appliquer à
l'installation de peinture artisanale. Cette expertise n’a pas mis en évidence un polluant particulier, mais des soupçons sont apparus vis-à-vis des durcisseurs.
Dans la même affaire, en 1997, le maire de la commune où se trouve le garage avait ordonné la fermeture de l'installation. La cour administrative d'appel de Paris a décidé que le maire ne pouvait ordonner une telle fermeture, car l'établissement ne présente pas de danger grave et imminent. Cette affaire montre donc que tant qu’il n’a pas été fait preuve d’un danger grave et imminent :
ð ni le maire ni le préfet ne sont compétents pour fermer ou imposer des prescriptions à une installation de peinture artisanale ;
ð les cabines de peinture non classées ne peuvent être considérées comme ICPE au regard de l'article 1 de la loi du 19/07/1976.
3.2.3.2 Affaire Elia contre garage du gymnase
Dans cette affaire (audience du 22 mai 1997), les époux Elia se plaignent des « troubles du voisinage » causés par la cabine de peinture automobile d'un garage proche. Les époux Elia
demandent des dommages et intérêts car :
ð la commune est dotée d'un POS et le garage est construit en zone UA ;
ð la cabine de peinture provoque des nuisances sonores et olfactives (odeurs
d'hydrocarbures).
L'arrêt rendu par la cour de cassation lors de cette affaire condamne le garage à payer
9 000 FRF de dommages et intérêts aux époux Elia, mais ne demande pas la suppression d’activité de la cabine. L'affaire a été renvoyée à la cour d'appel de Paris.
3.2.3.3 Affaire Malin : construction en zone UD d’un POS
M. Malin désire construire une cabine de peinture en zone UD, dans une ZAC. Une association de riverain a contesté le PC qui avait été délivré (4/02/1992). Ce PC a été annulé
par le TA de Chalon sur Marne (15/03/1992) car l’article 1.3 du règlement d’urbanisme applicable à la ZAC impose des conditions sur les installations pouvant engendrer des nuisances pour les habitations de la ZAC (en 1992, la cabine de peinture était encore soumise à déclaration).
Le 30/06/1994, la CAA de Nancy a confirmé la décision d’annulation du PC qui avait été accordé, notamment en considérant que la cabine de peinture « entraînerait forcément des nuisances olfactives ». Toutefois, on peut se demander si cette décision serait appliquée de la même manière, maintenant que la cabine ne constitue plus une ICPE/D.
3.2.3.4 Jurisprudence générale relative aux odeurs [32]
La jurisprudence relative aux odeurs fait apparaître des décisions relatives à :
un préjudice olfactif, dans ce cas le juge peut accorder des réparations à des
plaignants gênés par des odeurs, sans qu’il n’y ait de notion de toxicité attachée au préjudice ;
un tribunal administratif peut imposer des prescriptions complémentaires pour réduire les odeurs émises par une ICPE ;
Bilan sur la réglementation en vigueur
Lorsque l’atelier de carrosserie utilise plus de 500 kg de solvant par an, il est classé ICPE/D. S’il consomme plus de 100 kg.j- 1 (ce qui correspond à la consommation d’une installation industrielle) de produit il est classé ICPE/A. La réglementation qui s’applique dans ces deux cas est bien définie et permet de gérer les éventuels conflits.
Dans le cas où la cabine de peinture n’est pas classée, la réglementation existante est très précise par rapport à la protection des travailleurs, mais elle reste limitée en ce qui concerne les rejets ou la protection des riverains : le RSD pourra être utilisé pour justifier de la nécessité de travaux sur les conduits de rejet.
Il peut donc se révéler utile de disposer d’éléments facilitant le déroulement d’une évaluation des risques, pour pouvoir se référer ensuite à l’article L 220-1 du code de l’environnement.
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